de La Place
de La Place

 Calais 01. 03. 1707 – Paris 14. 05. 1793. Avocat, écrivain et journaliste.

Installé au 3e fauteuil en 1737, il est considéré comme l’un des fondateurs de la Société littéraire d’Arras avec l’ingénieur militaire Victor-Hyacinthe d'Artus et le conseiller Galhaut de Lassus, et il en est le premier secrétaire. Rapidement absent d’Arras, il est remplacé en 1841 par Louis Joseph Cauwet de Baly  et au secrétariat par Harduin.

Pierre Antoine de La Place (ou Delaplace) est né à Calais le 1er mars 1707 de Pierre de La Place et de Jeanne Lauret ou Loret, vielle famille réformée. Il est envoyé à l’âge de sept ans au collège des jésuites anglais à Saint-Omer où l’enseignement est donné en langue anglaise ; il y reste jusqu’en 1721 et devient parfaitement bilingue. Il étudie le droit à Paris en 1733, puis revient à Arras où il est nommé échevin. Il se pique déjà d’écrire et essaye de nouer une relation épistolaire avec Voltaire : « ‘Je suis ton écolier, et fais gloire de l’être. Si j’ai quelque talent, tes écrits l’ont formé, Trop heureux de n’avoir rimé Qu’après avoir su te connaître’ ». Dans une lettre du 14 novembre 1735, Voltaire lui répondit aimablement qu’il avait trouvé dans ces quelques vers « beaucoup de goût et de génie ».  

C’est à ce moment qu’il devient un des premiers membres de la Société littéraire d’Arras et qu’il accepte d’en être le secrétaire.  Mais son rôle y est très modeste. En effet, élu député des états d’Artois, pour la bourgeoisie, en 1740 et 1741, il s’est installé définitivement à Paris. Et il est très rapidement remplacé, sinon de droit, du moins de fait, par Harduin, premier occupant du 34e fauteuil. D’ailleurs, La Place démissionne de l’Académie en 1745. « La Compagnie reçut une lettre très-belle de son secrétaire-perpétuel donnant sa démission, motivée par son éloignement continuel d’Arras. Et M. Harduin fut désigné officiellement huit jours plus tard pour lui succéder ». (De Cardevacque). Toutefois, l’Académie ne lui désigne de successeur qu’en 1769 en la personne de Fruleux de Souchez.

À Paris, La Place se consacre totalement aux belles-lettres et d’abord à la traduction des écrivains anglais. La littérature anglaise étant à la mode, La Place s’empresse « avec plus d’ardeur que de talent » d’exploiter ce genre et il y puise le plus clair de son revenu. Se croyant né pour le théâtre il traduit en 1746 une tragédie d’Otway, Venise sauvée, qui obtint un succès passager.

Le Père Ignace raconte que La Place envoya cette œuvre à l’académie d’Arras : le 4 février 1747, « un des associés fit à haute et intelligible voix la lecture de la Venise sauvée [drame imité de l’anglais] de M. de La Place, ci-devant académicien. Elle fut lue toute entière, on la goûta, et par-ci par-là elle fut un peu critiquée. Cette lecture tint jusqu’à huit heures du soir ».  

Jusqu’en 1760, La Place vécut surtout de ses traductions.

La marquise de Pompadour à qui il avait rendu service l’en récompensa en lui permettant d’entrer au Mercure et d’en prendre la direction en février 1760. Pendant huit ans, cette charge, complétée par les produits de la publication des volumes du Nouveau choix de pièces tirées des anciens Mercures et des autres journaux, lui assura de substantiels revenus.

Le chanoine Van Drival signale, à l’occasion d’une lecture d’Harduin que « des rapports déjà établis, devinrent de plus en plus fréquents avec le Mercure de France, ce qui donna peu à peu à la Société d’Arras, une renommée d’une assez grande importance ».

La Place fut écarté du Mercure en 1768 et reprit la publication de nouveaux romans et traductions pour compléter la confortable pension que le nouveau directeur du journal lui versa jusqu’à sa mort. Cela ne l’empêcha pas de se ruiner et il dut s’enfuir à Bruxelles avant de revenir terminer laborieusement sa vie à Paris.

Durant sa vie parisienne, La Place avait fréquenté les écrivains célèbres de son temps, les cercles à la mode, et avait été initié aux rites maçonniques. Selon La Harpe qui a rédigé sa notice nécrologique dans le Mercure, il était « grand hâbleur, mais obligeant, souple, actif, et de plus homme de plaisir et de bonne chère ; il s’était lié de préférence avec certains auteurs tels que Piron, Duclos, Collé, Crébillon fils, qui, comme lui, aimaient la table et le cabaret ». Et il cite La Place qui dit de lui-même dans son épitaphe :

Sans fortune, en dépit du sort
Il a joui jusqu’à la mort.

Publications

La Place, à défaut de passer à la postérité, fut un écrivain prolixe. Il est l’auteur de cent-dix œuvres recensées à la BNF, dont soixante-quinze sont consultables sur Gallica. Parmi elles, ses traductions d’œuvres anglaises, recueillies sous le titre Le théâtre anglais, Londres et Paris, 1745-1748, 8 volumes et sous le titre, Collection de romans traduits ou imités de l’anglais, Paris, 1788, 8 volumes ; quelques pièces de théâtre : Venise sauvée (1746), Les deux cousines (1746), Adèle de Ponthieu (1757), l’Épouse à la mode (1760) ; et d’autres œuvres diverses : La laideur aimable, Paris, 1752 ; Lettres à Milady*** et autres Œuvres mêlées, Paris, 1773 ; Pièces intéressantes et peu connues pour servir à l’histoire, Bruxelles, 1781 ; Recueil d’épitaphes sérieuses, badines, etc, Bruxelles, 1782…

Sources

LUQUET G-H, La Franc-maçonnerie et l’État en France au XVIIIe slècle, 1963.

COBB Lillian, Pierre Antoine de La Place. Sa vie et son œuvre (1707-1793), Paris, 1928 

DE CARDEVACQUE Adolphe, Les fondateurs de l’académie d’Arras, Arras, 1884, p 24.

« Extrait des recueils du Père Ignace, capucin, …, pour servir à l’histoire de la Société littéraire d’Arras », Mémoires de l’académie d’Arras, t. XXXV (1863), p. 347 et 416.

HOEFER, Nouvelle Biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, t.XL, Paris, Firmin-Didot, 1862.

SGARD Jean, Dictionnaire des Journalistes (1600-1789), notice 454, La Place Pierre de (article en ligne)

Jean-Pierre Diers