Albert PLICHON, 1878 © Académie Arras

Hesdin 21 frimaire An 12 (13.12.1803) – Arras 28.01.1887. Docteur en médecine, maire d’Arras et conseiller du canton d’Arras-nord.

Élu en 1848, sous la présidence du colonel Claude Répécaud, pour succéder au baron Joseph Lallart sur le 4e fauteuil. Il est reçu le 19 mai 1853 par le président François Parenty. Il est remplacé en 1883 par Henri Trannin.

Il est le fils de Pierre Hyacinthe Louis Plichon, marchand bonnetier à Hesdin, et de Madeleine Évrard. Il épouse Julie Flament, le 9 février 1829, à Neuvireuil.

Après ses études de médecine à Paris, il s’installe à Arras où il acquiert une clientèle considérable et une notoriété certaine. Il enseigne à l’école préparatoire de médecine et de pharmacie d’Arras, dirigée par le chirurgien Benjamin Leviez [ancien académicien]. Il y côtoie les médecins Toursel, Duchâteau, Mercier, Dassonneville et le pharmacien, Brégeaut [Tous académiciens].

Il est élu à l’Académie d’Arras au début de l’année de 1848, à un moment où l’Académie compte dans ses rangs plusieurs générations d’acteurs majeurs de la vie politique locale (des conservateurs légitimistes : Charles Thellier de Sars, Charles Wartelle-Deretz, Irénée Fréchon, le baron  Léon Wartelle d'Herlincourt ; les anciens maires orléanistes Jacques Dudouit et Maurice Colin ; des républicains démocrates : Frédéric Degeorge, Antoine Luez, Henri Billet, Léandre Leducq, Timothée Cornille). Les échanges politiques y empiètent parfois sur l’ordre du jour « académique ».

La révolution de février 1848 propulse le brillant docteur Plichon dans la vie politique, et la part qu’il y prend l’oblige à renoncer à l’exercice de la médecine et à repousser sa réception à l’Académie.

Il était déjà conseiller municipal, membre de la coalition anti-orléaniste des républicains modérés et des conservateurs légitimistes, et la ville d’Arras n’avait plus de maire depuis la démission de Maurice Colin en novembre 1847. Le 25 février 1848, une manifestation populaire arrageoise, à l’annonce de l’insurrection parisienne, le porte à la tête de la commune, au sein d’un triumvirat provisoire avec l’avocat Émile Lenglet, et le notaire Henri-Alexandre Arnouts. Quelques jours plus tard, le 7 mars, c’est lui qui est nommé maire. Le 2 avril 1848, il assiste aux côtés de Mgr Parisis, évêque d’Arras, à la plantation d’un arbre de la Liberté sur la Petite Place, au milieu d’une immense foule en liesse. Son élection est confirmée démocratiquement lors des municipales du 3 juillet 1848. Il restera maire d’Arras jusqu’en septembre 1870.

Dans la foulée, il brigue un fauteuil de conseiller départemental. Soutenu par les quotidiens conservateurs Le Courrier du Pas-de-Calais d’Auguste Tierny et La Liberté du marquis d’Havrincourt, il triomphe aux élections cantonales des 27 août et 3 septembre 1848, et devient conseiller du canton d’Arras-nord. Il conservera ce mandat jusqu’en septembre 1870. [Il succède, dans ce mandat, à l’académicien Jacques-François Dudouit, et il sera remplacé par l’académicien Émile Lenglet]. Il préside le Conseil général du 21 novembre 1848 au 2 décembre 1851.

Il est encore le candidat du parti de l’Ordre aux élections législatives du 13 mai 1849 sur une liste résultant de la fusion des diverses tendances de la droite locale, où figurent aussi Charles Wartelle-Deretz, le riche et puissant marquis d’Havrincourt et le chanoine Fréchon, À cette occasion, il bat Frédéric Degeorge. Bien élu (le 3e sur 15), il siège à droite, vote avec la majorité monarchiste, appuie la politique présidentielle de Louis-Napoléon Bonaparte et applaudit au coup d’état du 2 décembre 1851. Mais, malgré le soutien de l’administration (candidat « officiel », il reçoit la Légion d’honneur le 4 janvier 1852), et bien que toujours populaire à Arras, il échoue aux élections législatives de 1852, les électeurs des campagnes lui préférant Léon Wartelle d’Herlincourt soutenu par le Courrier du Pas-de-Calais, et encore à celles de 1863, battu par le républicain modéré Jules Piéron-Leroy.

En tant que maire, il subventionne, accueille et inaugure dans la salle des Concerts, rénovée pour cette circonstance, les travaux de la 20e session du Congrès scientifique de France, le 23 août 1853. Parallèlement au congrès, il organise une exposition des produits agricoles et industriels du Nord de la France. Cette même année 1853, il accueille la première visite de l’empereur Napoléon III, les 22 et 23 septembre. Réceptions, bals, revues et illuminations se succèdent. Il accueillera encore l’empereur le 26 août 1867, et en sera récompensé par son élévation au grade d’officier de la Légion d’honneur.

Maire d’Arras, bien secondé par son adjoint l’avocat Edmond Lescene [reçu en même temps que lui à l’Académie le 19 juin 1853], il poursuit l’œuvre d’urbanisme initiée avant lui par Jacques Dudouit et Maurice Colin [eux aussi académiciens]. Il n’oublie pas qu’il a eu à gérer, au début de son mandat municipal, les cas de choléra de 1849. Il essaye de faire d’Arras une ville moderne et saine Il fait construire l’abattoir (1849) à l’entrée nord de la ville, et, pour remplacer les anciens puits, il décide l’installation d’un réseau de distribution par des bornes fontaines, de l’eau potable captée aux sources Méaulens (1856-1862). Il poursuit l’installation de l’éclairage au gaz, initiée par son prédécesseur, Maurice Colin, et fait construire des trottoirs à l’occasion de la pose des canalisations d’eau et de gaz. Il fait couvrir le ruisseau du Crinchon dans sa traversée de la ville, et aménager, au-dessus, la place qui le recouvre en marché aux chevaux (actuel Cours de Verdun). On lui doit la plantation du jardin des Allées (1865) et la transformation en square public du jardin botanique de Saint-Vaast réservé jusque-là à l’école de pharmacie d’Arras (1867). Il fait ajouter une annexe à la salle des Concerts, agrandir l’Hôtel de Ville et dégager ses abords (1860-1867).  Le développement spatial de la ville reste limité par le corset des remparts.

Sous son majorat, on construit le temple protestant de la rue Victor Hugo et Alexandre Grigny, architecte diocésain, transforme l'ancienne usine d'Aléxis Hallette en petit séminaire (1857-1859), construit la chapelle néo-gothique du pensionnat des Ursulines (1859-1865) et l’église Saint-Géry dans le terrain du Vivier (1857-1866). Son disciple Clovis Normand dresse les plans de l’église néo-romane Notre-Dame des Ardents (1869). La municipalité subventionne la Société artésienne des amis des arts, formée par Constant Dutilleuxet Xavier Dourlens, et en devient président d’honneur. En novembre 1868, Plichon entre comme actionnaire dans la nouvelle société formée par le baron de Sède pour gérer la Société du Courrier du Pas-de-Calais qu’il vient de racheter à Auguste Tierny, et où d’Héricourt, Advielle, Van Drival, Grandguillaume, [académiciens] apportent leur contribution.

Comme académicien, dans son discours de réception à l'Académie, le 19 mai 1853, il définit sa conception du rôle des académiciens « ouvriers souvent inconnus de la civilisation » : « Sous leur plume, la langue s’épure, les obscurités de l’histoire se dissipent, les lumières se répandent de proche en proche ; mais à leurs travaux silencieux que la solitude du cabinet fait éclore, il faut un centre commun. Il leur faut de ces réunions intimes, où les conseils mutuels, les encouragements pleins de bienveillance guident et soutiennent. Voilà, Messieurs, ce qui fait l’utilité, ce n’est point assez dire, la nécessité des sociétés académiques ». Mais, accaparé par son rôle public, il n’a pas le temps de contribuer à ses travaux.

La chute du second Empire met fin à sa carrière politique. Faute d’archives, il est impossible de savoir s’il assiste enfin aux séances de l’Académie dont il est resté membre.

En 1883, il se retire dans son château du Prieuré à Beaurainville où il décède en 1887.

Chevalier de la Légion d’honneur le 4 janvier 1852 ; officier le 1er septembre 1867.

Publication dans les Mémoires de l’Académie d’Arras

« Discours de réception le 19 mai 1853 », MAA, 1ère série, t. XXVII (1854), p. 117-127.

Sources

État civil : naissance, AD 62, 3E 447/20, p. 28/246 ; mariage, AD 62, 5 MIR 612/1, p 673/1174 ; décès, AD 62 3 E 100/14 p. 282/344.

Archives départementales, série 2 O.

Légion d’honneur : LH//2180/36.

TRANNIN Henri, Discours de réception le 24 août 1883 », et, LECESNE Edmond, « Réponse au discours de réception d’Henri Trannin », Mémoires de l’Académie d’Arras, 2e série, t. XV (1884), p. 13-44.

ROBERT, BOURLOTON, COUGNY, « Plichon », Dictionnaire des parlementaires français, t. V, p.6, 1891.

CARDEVACQUE Alphonse de, Dictionnaire parlementaire du département du Pas-de-Calais, 1896.

HILAIRE Yves-Marie, « Chapitre XII, 1815-1870 : de la Monarchie à l’Empire », dans Histoire d’Arras, Éditions des Beffrois, p. 243-260, 1988.

MOREAUX Charles, « L’enseignement médical à Arras au XIXe siècle », dans Arras le savoir et la curiosité, Aspects de la vie culturelle dans une ville préfecture au XIXe siècle, p. 199-212, 2000.

CHAMBRE Jean-Pierre, « La culture médicale des praticiens arrageois au siècle de la révolution pastorienne », dans Arras le savoir et la curiosité, Aspects de la vie culturelle dans une ville préfecture au XIXe siècle, p. 297-310, 2000.

VISSE Jean-Paul, La presse arrageoise, 1788-1940, p. 166-167, 335, 2009.

GUISLAIN Jean-Marc, « Plichon Hippolyte », Arras-Artois-Côte d’Opale, Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, p. 452, 2013.