Arras 18.05.1849 – Arras 23.02.1908. Directeur du Mont de Piété d’Arras, journaliste, homme de lettres et historien, collectionneur éclectique, amateur d’art.
Élu en 1887 pour succéder à Charles de Linas sur le 24e fauteuil, reçu le 24 août 1888. Il est remplacé en 1910 par le docteur Alfred Lestocquoy.
Né dans une famille de commerçants et d’artisans, habité très jeune par sa passion pour l’histoire et pour les arts, il est initié vers l’âge de vingt ans à la peinture par l’artiste arrageois Désiré Delaporte. Républicain convaincu dans la période troublée qui suit la chute de Second Empire, militant dans l’âme, il diffuse les idées républicaines et contribue à fonder le Comité républicain. Franc-maçon, il fait partie de la loge Constante Amitié où il côtoie le futur maire d’Arras, Adolphe Lenglet, et il s’intéresse aux questions d’instruction et d’éducation. En 1873, il crée une première bibliothèque populaire et il est aussi cofondateur de la Société artésienne des amis de l’instruction qui intègre en 1880 le mouvement national de l’Association philotechnique, dispensatrice de cours du soir pour les ouvriers et de conférences. Barbier en organise la bibliothèque.
En 1882, il est nommé directeur du Mont-de-Piété et participe activement à la vie culturelle de la cité. Cofondateur de l’Union artistique du Pas-de-Calais dont il est successivement secrétaire, trésorier, puis, en 1896, président. Cette association encourage et soutient les artistes par le biais d’expositions, de ventes…
Élu à l’Académie d’Arras, il est chargé des rapports du concours de poésie de 1889 à 1896 et en 1898. Il est secrétaire-adjoint de 1893 à 1899, puis secrétaire-général de 1899 à sa mort, et rédige les rapports sur les travaux académiques de l’année, de 1901 à 1907.
Nommé par arrêté préfectoral du 6 janvier 1888 à la Commission départementale des monuments historiques qu’il préside à partir de 1900, il bataille pour préserver des témoins remarquables lors du démantèlement des fortifications d’Arras. Il est encore membre de la Société des antiquaires de la Morinie, de la Société de la Betterave qui réunit à Paris les élites nordistes. Il faut mentionner aussi sa tentative de rénovation, en 1877, des Rosati, même s’il est davantage lié aux Rosati de Paris et qu’il rapporte avec un brin de condescendance l’accueil que ces derniers reçoivent lors de leurs passages à Arras. En réalité, le véritable rénovateur des Rosati, est Lucien Lenglet qui dote la société de statuts et l’associe à l’organisation à Arras en 1904 de l’Exposition du Nord de la France. La même année, le 9 juin, Victor Barbier reçoit à Blangy, berceau des Rosati, la rose d’honneur (appelée depuis rose d’or).
Homme de plume et journaliste, il rédige en 1900 un intéressant panorama de la vie culturelle du département au cours du XIXe siècle, il tient la chronique théâtrale dans le quotidien républicain L’Avenir d’Arras et du Pas-de-Calais, et il est surtout le fondateur et le rédacteur en chef du Carillon d’Artois, hebdomadaire satirique paru entre mai 1884 et juin 1886. Sous divers pseudonymes, par exemple Zidore Pitanchu, aussi bien en prose française qu’en patois, il écrit beaucoup : chansons pour la fête d’Arras, poésies s’inscrivant dans le courant régionaliste et qui lui valent l’estime de Desrousseaux.
« Fureteur infatigable et averti », il consacre du temps à la recherche, à l’acquisition de manuscrits, brochures, archives, gravures…Sa bibliothèque est une collection unique pour l’histoire des choses et des hommes du département. Attentif aux ventes publiques, client des librairies spécialisées, riche d’un grand tissu de relations, il a, par exemple, accès à la vente du baron Dard à Saint-Omer, et peut acquérir les papiers d’Antoine Buissart qui fut l’ami de Carnot et des frères Robespierre. Il est, à cause de cette passion pour la Révolution française et pour Robespierre, sur le point de publier, avec la Société d’études robespierristes qu’il a contribué à fonder, le tome I des œuvres complètes de l’illustre arrageois. Son décès va tout retarder. Autre conséquence de sa disparition, l’abbé Rohart président de l’Académie d’Arras, souhaite que tous se mobilisent pour éviter la dispersion de la collection de Barbier. Le Conseil général décide de l’acheter et s’ensuivra un long travail d’inventaire des archives départementales. Ces archives constituent toujours pour les chercheurs une source très importante. Le 8 novembre 1909, pour commémorer le poète, l’érection d’un monument est décidée par la municipalité d’Arras lors d’une réunion sous la houlette du maire, M. Minelle. Le comité d’honneur est présidé par l’abbé Rohart. Un monument en forme de rocher est élevé en 1911 par les établissements Octave Bouchez, square Saint-Vaast, orné d'un médaillon en bronze dû au ciseau d’André Barbier, fils de Victor. Il a été détruit pendant la Grande guerre.
Époux d’Angéline Duhaupas, Victor Barbier est père de deux enfants, Georges et André. Ce dernier fut à la fois passionné de science, d’archéologie (il crée un dispositif pour faciliter la prise de photos aériennes) et de peinture. Installé à Giverny, il entretint des relations proches avec Monet. Son oeuvre picturale s'inscrit dans la mouvance impressionniste. Il est plus connu à l’étranger qu’en France.
Barbier est titulaire des palmes académiques.
Publications dans les Mémoires de l’Académie d’Arras
Réponse au discours de réception de M. Desprez, MAA, 2e série, t. XXXVIII (1907), p.45-56.
À Abel Bergaigne, poème dit à l’inauguration du monument de Vimy, MAA, 2e série, t. XXX (1899), p.99.
Épitre à Mgr Deramecourt, MAA, 2e série, t. XXIX (1898), p.343-346.
Autres publications :
Les Rosati, notice historique et choix de poésies, 1888, 72 p.
Lettres inédites d’Augustin Robespierre à Antoine Buissart […], 1891, 51 p.
« Fédération artésienne du 3 juin 1790. Projet d’une confédération générale soumise à l’Assemblée nationale par la commune d’Arras », dans Mémoires de la commission départementale des monuments historiques du Pas-de-Calais, t. 1, p. 209-218.
« Beaux-arts et belles lettres », dans Le Pas-de-Calais au dix-neuvième siècle. I. Administration générale, villes, arts et lettres, 1900, p. 131-180.
En collaboration avec Charles VELLAY, Œuvres complètes de Maximilien Robespierre, t. I, Œuvres judiciaires, 1910.
Sources
AD 62, M 2695, notice probablement autobiographique.
Voix du Nord, 22 janvier 2004, 26 juin 2016.
WINTREBERT Patrick, « Victor Barbier, amateur d'art, poète, historien, journaliste et bibliophile » , dans Histoire et mémoire, Archives départementales du Pas-de-Calais, juin 2009, n° 58, p. 6-12.
CAUDRON Louis, Histoire des Rosati du vingtième siècle.
BERTHE Léon Noël, « Sociologie de l’Académie d’Arras ».
BESNIER Georges, « Les trente fauteuils de l’Académie d’Arras », in Courrier du Pas-de-Calais, avril-mai 1937.
OTT Jean, Sous le signe de la Rose, Paris 1933.
ROHART Charles, Adieu à M. Victor Barbier, MAA, 2e série, t. XXXIX, 1908, p. 20-26.
« Victor Barbier », Le Carillon d’Arras, n° spécial, 1er juillet 1911.
Patrick Wintrebert et Gérard Devulder