Achmet de Servins d'Héricourt

Vers-Hébécourt (Somme) 19.08.1819 – Souchez 21.01.1871. Propriétaire, historien, archéologue, bibliophile.

Élu le 14 juillet 1843, sous la présidence de Louis François Harbaville pour succéder à Théophile Foissey sur le 8e fauteuil. Reçu le 1er décembre 1843. Secrétaire-adjoint (1843-1846), vice-chancelier (1852-1854), secrétaire général (1860-1865). Affaibli par la maladie, il démissionne. Il est remplacé en 1868 par Émile Lenglet.

Il est le fils de Charles-François de Servins comte d’Héricourt, et d’Alexandrine Louise Thérèse Deswastine de Bussi, Orphelin de sa mère à l’âge de cinq mois, il est élevé par sa belle-mère, Caroline Boistel Ducardonnois, après le remariage de son père, le 11 décembre 1822, à Souchez.

Il commence ses études au collège d’Arras, les poursuit à Boulogne-sur-Mer dans le pensionnat de l’abbé Haffreingues, et les termine au collège Stanislas à Paris où il s’initie à la recherche historique.

Rentré à Arras à l’âge de dix-huit ans, en 1837, il mène ses premières recherches et les publie dans Le Puits artésien, revue du Pas-de-Calais, « recueil de productions intellectuelles de la province d’Artois », où il rencontre Louis-François Harbaville et Alexandre Godin.

Après son mariage avec Joséphine Valentine Doresmieulx, à Fouquières-les-Béthune, le 22 janvier 1840, il s’installe à Souchez dans le château du Carieul.

À partir de 1842, il confie plusieurs travaux à Aimé Leroy, bibliothécaire de la ville de Valenciennes, et Arthur Dinaux, de la Société royale des Antiquaires de France, éditeurs depuis 1829 des Archives historiques et littéraires du Nord de la France et du Midi de la Belgique. Sa notoriété s’étend, et sa compétence est reconnue. Dinaux écrit, en recensant son premier grand ouvrage, Les sièges d’Arras : « Nous savons gré à M. d’Héricourt de la publication des pièces justificatives qui complètent son livre ... Nous approuvons fortement aussi l’excellent index et la table qui complètent le volume : c’est une ancienne coutume du vieux temps qu’il serait bon de voir généralement adopter » (Archives hist, t. 5 (1844), p. 461). Les années suivantes sont marquées par la publication de ses œuvres les plus importantes : Les Rues d’Arras (1856), Les troubles d’Arras (1850), Les livres imprimés à Arras (1851-1854), qui font de lui, selon Georges Besnier, « le rénovateur des études historiques en Artois ».

Il est aussi l’un des fondateurs de la Commission des Monuments historiques dont il est élu, le 3 mars 1846, membre du bureau, avec Louis-François Harbaville, Alexandre Godin,  François Parenty, Léandre Grandguillaume, Auguste Terninck et Alexandre Grigny. Il y est, jusqu’à son retrait en 1864, « l’homme zélé, ardent, au feu sacré, qui incitait au travail, mettait tout le monde en action... (Van Drival) » Il y donne de nombreuses communications et quelques articles (sur les anciens monuments et les caves d’Arras, d’Ablain-Saint-Nazaire, de Givenchy-en-Gohelle, sur le beffroi de Béthune, les tours de Mont-Saint-Éloi). Il participe aux excursions et aux voyages archéologiques pour observer sur le terrain les découvertes les plus remarquables.

Dans un autre domaine, sollicité par Mgr Parisis, il accepte d’être le secrétaire de la commission de rédaction du Nouveau propre des saints du diocèse d’Arras.

Quand il est élu à l’Académie d’Arras le 14 juillet 1843, à l’instigation du président Harbaville, alors qu’il n’a pas encore vingt-quatre ans, il est déjà connu par ses publications. Le président se réjouit qu’il soit déjà « enrôlé dans cette phalange studieuse qui sur divers points du département travaille avec tant de zèle à débrouiller le chaos de nos vieilles origines ». Ayant immédiatement accepté la charge de secrétaire-adjoint, il impulse une direction « utile aux lettres et aux sciences, réveillant le goût pour les études, pour les communications sérieuses, faisant disparaître les vaines discussions sur le règlement et parfois même sur la politique auxquelles on s’amusait beaucoup trop » (Van Drival).

Devenu secrétaire perpétuel de l’Académie en 1846, il établit des relations avec plus de soixante sociétés savantes françaises et étrangères et contribue ainsi à l’enrichissement de la bibliothèque. En 1853, il est l’organisateur de la 20e session du Congrès scientifique de France, tenue à Arras du 23 août au 1er septembre. Pendant une semaine, plus de quatre-cent-vingt savants, ont échangé et débattu des grandes questions du moment : sciences naturelles, physique, mathématiques, sciences médicales, agriculture, commerce, industries, histoire et archéologie, littérature et beaux-arts. Il en est récompensé le 29 septembre 1853 par la Légion d’honneur.

Ses activités académiques lui ayant permis de tisser de nombreux liens avec les élites scientifiques européennes, il entreprend seul la publication, d’un Annuaire des Sociétés savantes de France et de l’Étranger, avec bibliographie de leurs travaux, et en assure deux livraisons (1863 et 1866) ; il lance aussi une revue mensuelle de ces institutions scientifiques, L’Analyse, compte rendu mensuel des institutions scientifiques, littéraires, artistiques, agricoles et industrielles de la France et de l’étranger. 1ère année, t. 1 (1866).  Ces deux initiatives sont trop vite interrompues par son état de santé.

Propriétaire terrien, il prend part aux travaux de la Société d’agriculture de l’arrondissement d’Arras, dont il est secrétaire jusqu’en 1866. Maire de la commune de Souchez pendant vingt-trois ans, de 1848 jusqu’à sa mort, il est l’homme de tous, et surtout des plus abandonnés, dans les malheurs publics et privés, notamment pendant le choléra de 1854. Toujours disponible, il conseille volontiers les autres édiles de son canton. Souvent pressé de donner son opinion, il s’exprime dans plusieurs revues et journaux, notamment dans Le Courrier du Pas-de-Calais.
Philanthrope, il fonde en 1855 et dirige jusqu’en 1861 la Société communale de secours mutuels d’Arras.

Sa santé s’altérant à partir de 1866, il s’installe à Paris pour mieux se soigner et se voit contraint d’abandonner progressivement ses engagements. Lorsque la guerre de 1870 éclate, il rentre à Souchez où il décède le 21 janvier 1871 à l’âge de 51 ans. Une foule considérable se presse à ses funérailles, alors qu’Arras est toujours menacé par l’invasion prussienne.

Il a été le premier d’une série d’historiens locaux qui ont pu écrire l’histoire d’Arras, de l’Artois et du Pas-de-Calais en s’appuyant sur les nombreuses archives conservées dans la bibliothèque municipale, héritière de celle de l’abbaye Saint-Vaast. Celles-ci en grande partie détruites en 1915, leurs travaux sont devenus des ouvrages de référence.

Chevalier de la Légion d’Honneur, 1853.

Décoré de l’ordre de Notre-Dame de la Guadaloupe, 1866.

Officier d’Académie, 1870.

Publications dans les Mémoires de l’Académie d’Arras

« Discours de réception », MAA, 1ère série, t. XXI (1844), p. 121-132.

« Rapport sur les archives de l’ancienne Académie d’Arras », MAA, 1ère série, t. XXI (1844), p. 157-169., suivi de la publication par ses soins du manuscrit de Dom Berthod, reçu par l’Académie d’Arras en 1170, « Vie de François Richardot, évêque d’Arras », p. 170-220.

« Rapport sur les travaux de l’Académie », MAA, 1ère série, t. XXII (1845), p. 20-32.

« Rapport sur les travaux de la Société », MAA, 1ère série, t. XXIII (1846), p. 24-33.

Avec Cicéron Caron, « Recherche sur les livres imprimés à Arras », MAA, 1ère série, t. XXV (1851), p. 206-336 ; t. XXVI (1853), p. 415-5645 ; t. XXVII (1854), p. 279-292.

« Notice sur Quènes de Béthune », MAA, 1ère série, t. XXVIII (1855), p. 57-68.

« Notice sur le baron de Stassart, ancien membre honoraire », MAA, 1ère série, t. XXVIII (1855), p. 147-178.

« Rapport sur le concours d’histoire (1857-1858) », MAA, 1ère série, t. XXXI (1859), p. 57-66.

« Ambassade en Espagne et au Portugal, en 1852, de Dom Jean Sarrazin, abbé de Saint-Vaast, par « Philippe de Caverel, religieux de Saint-Vaast », MAA, supplément au n° XXXII (1860).

« Compte-rendu des travaux de l’Académie », MAA, 1ère série, t. XXXVIII (1861), p. 13-38.

« Bauduin de Fer », MAA, 1ère série, t. XXXVIII (1861), p. 183-208.

Autres publications

« Histoire de l’abbaye d’Étrun », dans Le Puits artésien, 1839.

« Notice sur quelques villages de l’Artois », Le Puits artésien, t. V, 1841.

« Extrait du catalogue raisonné des manuscrits de la Bibliothèque de Bourgogne », Le Puits Artésien, t. VI, 1842.

« Triolets sur Cambray de 1649 », dans Archives historiques et littéraires du Nord de la France et du Midi de la Belgique, nouvelle série, t. 4, 1842.

« Simon de Hesdin », « Dom Lopez », « Notes historiques relatives aux offices et aux officiers du conseil provincial d’Artois », dans Archives historiques et littéraires du Nord de la France et du Midi de la Belgique, nouvelle série, t. 4, 1842.

Les sièges d’Arras, 1844.

Manuel de l’histoire de France, deux tomes, 1844 et 1846.

Étude biographique sur Charles XIV, roi de Suède (Bernadotte), 1844.

« Jeanne Divion », dans Archives historiques et littéraires du Nord de la France et du Midi de la Belgique, nouvelle série, t. 5, 1844.

« Extrait des affiches de Flandres du mois de septembre 1783 », Archives historiques et littéraires du Nord de la France et du Midi de la Belgique, nouvelle série, t. 6, 1847.

« La Maison rouge à Arras », Archives historiques et littéraires du Nord de la France et du Midi de la Belgique, nouvelle série, t. 6, 1847, p. 531-532.

Carency et ses seigneurs, 1849.

Troubles d’Arras 1577-1578. Relations de Pontus Payen, de Nicolas Ledé et autres documents inédits, 1850.

Le beffroi de Béthune, 1851.

Rapport sur les travaux et publications des savants de province, en 1852, d’après les renseignements communiqués au congrès des délégués, dans sa séance du 25 janvier 1853, 1853

Les évêques d’Arras, 1853.

Église d’Ablain-Saint-Nazaire, 1856.

Les rues d’Arras, dictionnaire historique, comprenant des notices sur leur étymologie, leur direction, et sur les établissements religieux, administratifs, militaires, etc., qui y étaient situés ; précédé d’un résumé de l’histoire d’Arras, 1856

Notice sur l’église d’Ablain-Saint-Nazaire, 1856,

Bauduin de Fer, comte de Flandres et les pierres d’Acq, 1861.

Notice archéologique sur églises d’Aix, de Souchez et de Vimy, 1861.

Avec Alexandre Godin, Rapport sur les pierres tombales trouvées en 1860, dans l’ancien couvent des Carmes, maintenant occupé par les dames Ursulines, 1862.

Annuaire des sociétés savantes de la France et de l’étranger, 1863 ; et 1866.

Les douze vertus de la noblesse, extrait du registre secret du sire de Boffles, seigneur de Souchez (Artois), au XVIe siècle, 1863.

« Hôtel d’Artois à Paris », dans Statistique monumentale du Pas-de-Calais, 1863.

L’Analyse, compte rendu mensuel des institutions scientifiques, littéraires, artistiques, agricoles et industrielles de la France et de l’étranger. 1ère année, T 1 (1866).

Vases gallo-romains découverts à Souchez (Pas-de-Calais), 1866.

Agriculture : Culture du houblon, 1867.

« Notice nécrologique sur M. le baron Léon d’Herlincourt », dans Bulletin publié par la Société centrale d'agriculture du département du Pas-de- Calais, 1867.

Notice sur l’église de Béthune, 1868.

Jehan Molinet, poète et historien du XVe siècle (d’après un manuscrit de la Bibliothèque d’Arras), 1869.

« Histoire de la ville de Béthune », note dans Dictionnaire historique du Pas-de-Calais, ouvrage posthume, 1875.

 

Sources

État civil : remariage de son père Charles François de Servins avec Caroline Boistel Ducardonnois, AD 62, 5 MIR 801/2, p. 314/1445 ; naissance, AD 80, 5MI_D866, p. 51/411 ; mariage, AD 62, 5 MIR 350/1, p. 847/1100 ; décès, AD 62, 5 MIR 801/2, p. 1042/1445.

Légion d’honneur, base Léonore : LH//2509/69.

Annuaire administratif et statistiques du Pas-de-Calais.

VAN DRIVAL Eugène, « Discours prononcé sur la tombe de M. le comte A. d’Héricourt au nom de l’Académie, à Souchez, le 24 janvier 1871 », et « Notice biographique de M. le comte A. d’Héricourt, ancien secrétaire perpétuel de l’Académie d’Arras », Mémoires de l’Académie d’Arras, 2e série, t. IV (1871), p. 205-207 et 276- 307.

BESNIER Georges, « Les trente fauteuils de l’Académie d’Arras », Le Courrier du Pas-de-Calais, 20-26 avril 1937.

VISSE Jean-Paul, « le Puits artésien », dans La presse arrageoise, 1788-1940, p. 349.